Le 6 juin 2025, est sorti le film À bout de Tyler Perry. Ce film met en scène Janiyah Wiltkinson (Taraji. P Henson), maman désabusée qui perd successivement son travail et son appartement, faute de loyers impayés. Mais alors qu’elle veut récupérer son solde de tout compte, elle va commettre l’irréparable. S’ensuit une série d’événements tous dommageables. Si le film est haletant et bien réalisé, on regrette toutefois une énième caricature d’Afro-américains par le réalisateur de 55 ans.
Une filmographie riche et variée…
Tyler Perry est un acteur et réalisateur américain né en 1969. Fort d’une carrière de près de 25 ans, il est notamment connu pour la saga Madea. Série de films qui le met en scène, grimé en grand-mère… Dans des situations toutes plus burlesques les unes que les autres.
Au cours de sa carrière, il enchaîne les pièces de théâtre, les comédies, les mélodrames. Et même les films d’animation avec le cartoon Pat Patrouille, et l’Étoile de Noel.
Il remporte un nombre important de récompenses, principalement des National Association for the Advancement of Colored People Images Awards (NAACP) Awards et des Black Entertainment Television (BET) Awards. Si sa carrière est couronnée de succès, on peut se demander à juste titre si cela n’a pas plus desservi les Afro-américains plus qu’autre chose.
Mais qui tourne vite en rond.
En effet, si on ne peut rien lui reprocher concernant la mise en avant d’acteurs afro-américains : on peut, en revanche, se questionner sur la manière dont ils sont dépeints.
Les personnages qu’écrit Perry sont souvent caricaturaux, voire dégradants. Pour les hommes, le natif de la Louisiane les dépeint souvent sans emploi, ou alors en ayant un métier pénible (The Family That Preys), avec de grosses tendances libidineuses. Ils sont rarement PDG, hauts cadres ou alors s’ils le sont, c’est à la suite de grosses compromissions physiques ou psychologiques.
Pour les femmes, pour prendre le cas de Taraji P. Henson dans le film À Bout, elle joue une mère célibataire, caissière, vivant dans un appart délabrée, subissant le harcèlement de son patron et de la police. Le monde est littéralement contre elle. La banque lui refuse un délai supplémentaire pour déposer son chèque. Résultat, (alerte spoil), elle assassine son patron et ensuite prend toute la banque en otage pour déposer son chèque.
Ce portrait de la femme afro-américaine n’a rien de reluisant. Surtout dans un contexte où la femme afro-américaine est vu depuis quelques années sous le prisme de la “Angry Black Woman”. Un stéréotype raciste et discriminatoire qui dépeint l’Afro-américaine comme agressive, pleureuse, hypersexuelle, et dangereuse. Ce portrait est d’autant plus dangereux que les femmes noires sont plus discriminées que les hommes noirs et les autres communautés. En effet, elles subissent deux rejets : sexiste de par leurs conditions de femmes et racistes de par leur couleur de peau.
Des études montrent même que les femmes noires sont moins prises au sérieux dans le milieu médical lorsqu’elles sont malades. Elles sont, de facto, déjà « fortes » selon certains médecins. Donc, moins sensibles aux maladies.
Défense discutable
Tyler Perry se défend de ses accusations en Juillet 2024 en disant : “who are you to be able to say which Black story is important… Get out of here with that bullshit (Qui es-tu pour pouvoir dire quelle histoire noire est importante ? Sors d’ici avec ces conneries.)”. Des déclarations qui ne réussissent pas à faire taire les critiques à son encontre. Elles donnent, au contraire, encore plus de fuel à ces détracteurs.
Ce qui est énervant, c’est que Tyler Perry sait qu’il a un pouvoir médiatique énorme, mais aussi une grosse plateforme. La manière dont il écrit ses personnages peut conforter les spectateurs dans leurs préjugés envers les Afro-américains. Aujourd’hui, les Afro-américains représentent 13 % de la population américaine. Mais environ 74 % d’entre eux disent subir de la discrimination.
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