À Reims, l’ancienne église du Sacré-Cœur accueille jusqu’au 10 septembre la première exposition de Rodrigo Salgado, artiste autodidacte et fils du célèbre photographe Sebastião Salgado. Une immersion lumineuse dans l’univers d’un créateur hors normes.
Peindre, inlassablement, depuis l’enfance. C’est ce que fait Rodrigo Salgado depuis plus de quarante ans. Âgé aujourd’hui de 45 ans, cet artiste atteint de trisomie 21 a bâti, dans le silence de son atelier, une œuvre sincère, dense et profondément émotive. Pour la première fois, son travail est présenté au public dans un lieu exceptionnel : l’ancienne église du Sacré-Cœur à Reims, désacralisée, qui devient le théâtre d’une exposition aussi intime que spectaculaire.
Intitulée « Rodrigo, une vie d’artiste », l’exposition rassemble 80 peintures, 16 vitraux et plusieurs sculptures. Le visiteur est invité à plonger dans un univers pictural singulier, où les couleurs franches et les formes puissantes traduisent la persévérance, la passion et la force intérieure d’un homme dont l’art est devenu un langage vital.
Un artiste à l’œuvre, chaque jour
Rodrigo Salgado peint chaque jour, dès l’aube, comme un rituel immuable. « Il se lève à cinq heures pour rejoindre son chevalet. Parfois même au milieu de la nuit », confie son père Sebastião Salgado. Cet élan créatif, presque instinctif, structure ses journées depuis l’enfance. Peindre n’est pas un passe-temps, mais une nécessité intérieure, une manière d’habiter le monde et de le traduire à sa façon. Cette discipline quotidienne s’est transformée, au fil des ans, en une œuvre cohérente et puissante.
La peinture comme nécessité vitale
Sa peinture a suivi les contours de sa vie : lumineuse et pleine de vitalité dans les premières années, elle s’est progressivement assombrie avec les épreuves, notamment la perte partielle de son autonomie. Ses toiles se sont alors couvertes de multiples couches de pigments, parfois jusqu’à l’opacité, marquant une période de retrait et d’introspection. Mais loin de s’éteindre, sa créativité s’est réinventée. Aujourd’hui, ses œuvres témoignent d’un équilibre retrouvé, entre spontanéité et maîtrise, émotion et abstraction. Il ne dessine plus comme avant, dit sa mère Lélia, mais ses tableaux conservent une densité et une énergie remarquables.
L’artiste Michel Granger, qui a ouvert les portes de son atelier à Rodrigo pendant plus de vingt ans, évoque avec admiration la précision de ses gestes, la confiance avec laquelle il trace ses contours au feutre noir, puis choisit ses couleurs. « Ce qui m’impressionnait, c’est qu’il n’avait pas de doute », raconte-t-il. Cette certitude du trait, cette absence d’hésitation, révèlent une posture d’artiste à part entière, affranchie des conventions et nourrie d’une sensibilité brute.
Des vitraux comme aboutissement lumineux
L’un des temps forts de l’exposition est la présentation des vitraux. En effet, ceux-ci sont réalisés à partir de ses dessins par l’illustre Atelier Simon-Marq, fondé en 1640. Véritable institution du patrimoine rémois, l’atelier connaît aujourd’hui un nouveau souffle grâce à Sarah Walbaum, avec le soutien de mécènes comme Philippe Varin et Pierre-Emmanuel Taittinger. Les seize vitraux créés à partir des œuvres de Rodrigo s’inscrivent avec éclat dans l’architecture de l’église du Sacré-Cœur, offrant une expérience visuelle saisissante. Les couleurs y dansent avec la lumière naturelle, réinterprétant le geste pictural dans une dimension monumentale et spirituelle.
L’événement s’inscrit dans le cadre de la Saison France-Brésil 2025. Elle rend hommage aux racines brésiliennes de Rodrigo tout en affirmant la dimension universelle de son travail. Cette exposition est bien plus qu’une rétrospective… C’est une rencontre avec une œuvre authentique, un hymne à la persévérance, à la beauté et à la singularité. « Rodrigo, une vie d’artiste » touche par sa sincérité et captive par sa force visuelle. Une invitation à regarder autrement et à ressentir profondément.
Informations pratiques
Rodrigo, une vie d’artiste.
Exposition du 27 mai au 10 septembre 2025.
Atelier Simon-Marq – Église du Sacré-Cœur, 48 rue Ernest Renan, Reims
Du mardi au samedi, de 10 heures à 12 heures et de 13 heures à 17 heures (sauf jours fériés).
Tarif : 6 euros – Réservation obligatoire via www.ateliersimonmarq.com
