Avec la quatrième exposition de la collection Pinault, cette fois consacrée au portrait et la rétrospective Claire Tabouret, Rennes s’impose comme ville-escale de l’art moderne et contemporain.
Collection Pinault, Les yeux dans les yeux
«Debout ! » c’était en 2018, « Au-delà de la couleur » en 2021 et « Forever Sixties » en 2023, dans l’écrin d’un couvent du XIVème siècle, celui des Jacobins magnifiquement rénové, la Collection Pinault, la Ville de Rennes et Rennes Métropole présentent cette année le nouvel opus de leur collaboration, une exposition inédite d’œuvres de la collection réunie depuis cinquante ans par le grand mécène, « Les yeux dans les yeux ». Le constat est flagrant : plus de la moitié des œuvres de la Collection Pinault, tous médiums confondus, traitent de la f igure humaine. À travers ce sujet, les artistes nous placent face à nos semblables, réels ou imaginaires.
Un face-à-face avec la figure humaine
Près de 90 œuvres issues ont été choisies pour cette « mise en scène », qui invite le spectateur à se confronter à de multiples visages. À travers ces regards et ces attitudes se lisent tensions, trajectoires, émotions, révoltes. Chacune de ces œuvre est une énigme à défricher, un paysage à explorer, Les yeux dans les yeux. L’image de soi « Tout à la fois Surface et symbole », comme le souhaitait Oscar Wilde, cette traversée de l’histoire de l’art, évoque ainsi le rapport à l’image de soi et de l’autre à l’heure des réseaux sociaux. Elle aborde aussi le phénomène de la disparition et de l’impossibilité, quelquefois, de capter un visage, une expression, un esprit. Regards masqués et regards francs se mêlent et s’affrontent. L’intimité finit par côtoyer l’éternité.
Regards, identités et disparitions
Ici, les artistes questionnent la représentation de soi et de l’autre via plusieurs sections aux titres explicites. Jouer avec le genre qui nous invite à regarder la personne représentée, mais aussi la manière dont elle l’est. Impossibles portraits où le portrait sonde l’âme humaine et les grands traumatismes du XXème siècle. Masques et peaux où l’individu est souvent mis en jeu ou à distance, dissimulée sous un masque, qu’il soit théâtral, rituel ou symbolique, ne laissant émerger que les yeux. Portraits intimes où le regard joue un rôle déterminant dans le portrait. Le spectateur est mis face à l’impérieux désir de lire, dans ces regards échangés toute l’intensité et l’intimité d’une relation.
Peints ou photographiés, ces portraits, parfois vieux de plus d’un siècle, dévoilent un regard autrefois réservé à une seule personne, suspendant le temps des sentiments. Tandis qu’enfin De l’intimité à l’éternité nous incite à la réflexion : A contempler dans les musées des portraits vieux de plusieurs siècles, parfois millénaires, certains visages du passé sont devenus familiers. Le portrait serait-il, d’une certaine manière, un pas vers l’immortalité ?



Des artistes tels que Xinyi Cheng, Nan Goldin, Damien Hirst, Annie Leibovitz, Yan Pei Ming, Shirin Neshat, Irving Penn, Cindy Sherman, Luc Tuymans, et bien d’autres, nous invitent « Les yeux dans les yeux » à une réflexion sur l’individu et la société contemporaine. Près de la moitié des œuvres sont exposées pour la première fois par la Pinault Collection à cette occasion.
Claire Tabouret aux Beaux-Arts
« C’est un temps de pause : de pause et de pose. Ils posent pour nous, les enfants en costume, elles posent pour nous, les femmes
dans les robes. C’est un état suspendu qu’on ressent, comme si on était un somnambule insomniaque… Ce sont des images entre la mémoire et l’oubli». Ainsi Claire Tabouret décrit-elle les œuvres qu’elle présente à Rennes. Artiste à la fois intemporelle et éminemment actuelle, classique par sa fidélité à la peinture sur toile et par le choix de ses sujets, contemporaine par les enjeux qu’elle traite, les questions auxquelles elle se confronte sont fondamentales : l’identité, l’altérité, le rapport au temps.
Formée à l’École des Beaux-arts de Paris, au tout début des années 2010, elle se détourne des toiles abstraites et minimales
et choisit plutôt de représenter des paysages inondés, puis des personnes.
Une rétrospective inédite en France
Avec plus de 60 œuvres et l’amplitude d’une rétrospective, il s’agit de la première grande exposition muséale consacrée en France à cette artiste d’envergure internationale. L’exposition de Claire Tabouret bénéficie de prêts exceptionnels de la Collection Pinault.
Dans le cadre de la 5ème édition d’Exporama, événement annuel lié à l’art contemporain qui fédère une vingtaine de lieux culturels dans la capitale bretonne voici donc deux expositions phares :
◗ « Les yeux dans les yeux ». Portraits de la Collection Pinault. Couvent des Jacobins – Jusqu’au 14 septembre.
◗ Claire Tabouret. Musée des beaux-arts de Rennes. Jusqu’au 21 septembre.